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SANTÉ EN AFRIQUE : RÉHABILITER LES SAVOIRS ANCESTRAUX POUR UNE VRAIE SOUVERAINETÉ SANITAIRE

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Par Magaye GAYE, Économiste international

Hier encore, j’ai écouté sur une radio sénégalaise un professionnel de santé mettre sévèrement en garde contre l’usage des remèdes traditionnels pour traiter l’asthme. Non seulement il rejetait leur efficacité, mais il ne laissait place à aucune nuance. Cette position radicale, en marge de la Journée internationale dédiée à cette maladie, m’a profondément interpellé.

Ce discours m’a d’autant plus marqué qu’il coïncide avec une expérience personnelle récente. Accompagnant un proche dans un hôpital public d’une capitale africaine pour une simple radiographie liée à une tendinite, nous avons appris — une fois de plus — que l’appareil était en panne. L’agent de santé nous a tout naturellement redirigés vers une clinique privée, mieux équipée. Cette scène banale est malheureusement le quotidien de millions d’Africains.

Les hôpitaux publics sur le continent restent sous-équipés et mal gouvernés. Dans l’établissement visité, les espaces verts sont impeccables, les salles d’attente modernisées, le restaurant refait. Mais les équipements médicaux essentiels manquent, les médicaments sont inaccessibles, et le personnel travaille dans des conditions précaires. On s’éloigne de l’essentiel.

Dans ce contexte, il est urgent de poser les vraies questions :

1. Comment soigner nos populations majoritairement pauvres et souvent malades, sans dépendre entièrement de l’importation de produits pharmaceutiques coûteux ?

2. Pourquoi continuer à rejeter les savoirs ancestraux, alors même que nombre de nos aïeux vivaient longtemps, en bonne santé, grâce à une alimentation locale et à la pharmacopée traditionnelle ?

Il est grand temps d’organiser une réflexion sérieuse autour de la valorisation des produits alimentaires locaux et des remèdes naturels issus de notre environnement immédiat. Le soump, le siddem, le néw, le ditakh, pour ne citer qu’eux, sont des trésors nutritionnels souvent négligés. Le moringa, le tamarin, le bouye ou encore le bissap possèdent des vertus médicinales reconnues, mais nos étals regorgent de sodas et jus industriels chargés de conservateurs.

Je me souviens d’un collègue libanais souffrant de constipation. Après avoir essayé plusieurs médicaments conventionnels sans succès, il a finalement été soulagé par une simple décoction de tamarin. Dix minutes ont suffi. Cet exemple n’est pas un cas isolé.

Mais voilà, les grandes firmes pharmaceutiques s’intéressent peu aux maladies tropicales comme le paludisme, jugées peu rentables. Et chaque année, à l’occasion des journées mondiales sur le diabète, l’asthme ou d’autres pathologies, on assiste à des campagnes de communication anxiogènes. S’agit-il de simples campagnes de sensibilisation ou du fruit d’un lobbying extérieur ? La question mérite d’être posée.

Pire encore, dans certains centres de santé, les délégués médicaux sont parfois reçus avec plus d’empressement que des patients en détresse. Cela aussi, c’est un problème.

Selon l’OMS, l’Afrique perd chaque année près de 2 400 milliards de dollars en raison de la mauvaise santé de ses populations. Pour inverser cette tendance, nos États doivent repenser leur politique sanitaire autour d’un triptyque simple : réhabiliter les savoirs ancestraux, renforcer les infrastructures médicales publiques et promouvoir une alimentation locale saine.

Ce dont l’Afrique a besoin pour se soigner se trouve, très souvent, dans l’Afrique elle-même. Il est temps de nous en convaincre.

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