Avec des candidats – et non des moindres – recalés par ci, d’autres bloqués par là, la vérification des listes de parrainages aura créé une situation inédite dans le paysage politique sénégalais. Emedia.sn a interrogé certains mandataires de candidats pour en savoir un peu plus du processus de vérification.
Comment se passe le processus de vérification des listes de parrainages pour qu’un candidat soit recalé sans que son mandataire ne comprenne le pourquoi du comment ? En trois jours, la situation est arrivée plusieurs reprises, au point de pousser à cette interrogation légitime.
A la lumière des témoignages de nos interlocuteurs qui ont participé, chacun pour son candidat, au processus, il ressort que dans la première étape dépassée ce week-end, les sept Sages du Conseil constitutionnel, en présence de membres de la Société civile invités à superviser les différentes étapes, vérifient d’abord si les signataires sont bien inscrits sur le fichier électoral. Ensuite, s’il n’y a pas de doublons (internes) au sein de la liste des signataires et enfin s’il n’y a pas de signataires déjà présents sur les listes de candidats passés auparavant (doublons externes).
Convocation d’un représentant à la séance de vérification
Concrètement, nous révèle une source dont le candidat a finalement réussi au premier examen de passage, « quand un mandataire entre dans la salle aménagée pour l’occasion, il y trouve les sept Sages, un greffier, les membres de la Société civile et un informaticien ». Ce dernier s’occupe de la partie technique, nous dit un autre mandataire, dont le candidat devra aller piocher encore dans sa réserve pour compléter une liste délestée de quelques signatures déjà retrouvées sur une autre liste. Mais, comment vérifier, en si peu de temps, autant de signatures (plus de 66 000 déposées par chacun des 27 candidats déclarés !) ?
En réalité, même si les candidats déposent des documents physiques (des kilos de papiers contenant les données et signatures des parrains), ils déposent également (et surtout) une clé USB contenant les mêmes données. C’est sur la base de ce support que la vérification est faite par un logiciel du Conseil constitutionnel. Dans la clé USB, les données sont stockées dans un fichier Excel. A la base, ces documents déposés par les différents mandataires dans la nuit du 11 au 12 décembre 2018, sont transmis au Greffier et la clé USB est mise sous scellé. A noter que même si la vérification se fait sur la base du document électronique, le document physique est gardé par le Conseil constitutionnel qui pourrait l’utiliser en cas de nécessité pour une vérification complémentaire.
Représentants d’un candidat posant devant le CC lors de leur dépôt de liste
Le jour de la vérification, la première étape sera, pour le greffier, de montrer la clé USB à ceux qui sont dans la salle et de demander au mandataire de confirmer que c’est la même clé qu’il avait déposée deux semaines auparavant. Puis, le support est descellé devant toute l’assistance et transmis à l’informaticien du Conseil constitutionnel. Ce dernier ouvre le fichier Excel contenant les données à vérifier. Première étape de sa mission de technicien : copier et convertir le fichier en format plus léger pour être transférer dans son logiciel de vérification. Puis, le logiciel analyse les données et délivre le nombre total produit dès que le fichier est intégré. Ensuite le contrôle est lancé. Le fichier est fait de sorte qu’il stocke les données par régions où le candidats a collecté des signatures.
Pour chaque région, le logiciel montre le nombre de signatures collectées. Le logiciel vérifie au fur et à mesure. Le logiciel vérifie au fur et à mesure et à gauche de l’écran de l’informaticien, il y a un moniteur qui indique le nombre total de signatures. A droite, le nombre total de rejets. Ensuite, un listing est fait par le logiciel, qui montre les rejets pouvant être régularisés. Le logiciel indique ensuite les rejets pour « autres motifs ». Tout le processus de vérification prend entre 30 et 40 minutes, si l’on en croit les deux mandataires interrogés. Lesquels, malgré leurs sorts différents, regrettent tous les deux que le logiciel ne soit pas testé, mis à l’épreuve, auparavant par les candidats.
L’autre grief de la plupart des mandataires réside dans le fait que les motifs des rejets n’ont pas été précisés. « On ne peut pas vous dire rejet pour autres motifs sans que le motif ne soit indiqué, c’est regrettable », souffle un de nos interlocuteurs. Ces motifs devraient, en principe, figurer dans le Procès-verbal qui sera disponible à partir de mercredi et qui précisera le nombre de signatures validées par région.
Une fois le PV mis à la disposition du concerné, le candidat, conformément à la loi, dispose de 48 heures pour s’y mettre, en puisant sans doute dans la réserve de signatures que ses équipes avaient collectées. En effet, même si un candidat avait collecté un million de signatures, il n’a pu déposer que le maximum requis, soit un peu plus de 66 000 signatures. L’exigence est d’avoir au moins 2000 signatures dans au moins sept des 14 régions du Sénégal. Sur ce point, on ne précise pas non plus si la Diaspora, comme lors des précédentes élections législatives, est considérée comme une 15e région, ce qui fait que certains des candidats ont rechigné à déposer des signatures collectées hors du pays, par mesure de sécurité.
Parmi les motifs de rejet, même si ce n’est pas encore précisé lors de la première vérification, les doublons occuperont une très large part. Doublons en interne d’abord : qu’un signataire ait été retrouvé plus d’une fois sur une même liste. Doublons en externe ensuite : qu’un signataire soit retrouvé sur une liste arrivée auparavant au Conseil constitutionnel, ce qui expliquait la fameuse course désordonnée et violente entre les différents mandataires lors du dépôt le 11 décembre dernier. Premier venu, premier servi. Il y a également les motifs éventuels de voir des signataires ne se retrouvant sur le fichier électoral.
source emedia