Le chef du gouvernement et quatre ministres ont organisé une conférence de presse ce jeudi pour se prononcer sur les émeutes survenues durant le premier, deux et trois juin 2023. Amadou Ba, Abdou Karim Fofana, Sidiki Kaba, Antoine Diome et Ismaïla Madior Fall ont expliqué qu’en partie c’est la raison pour laquelle Ousmane Sonko a été assigné à résidence. Selon eux, la dernière tournée du maire du Ziguinchor, juste avant que le verdict de son procès Adji Sarr, est à l’origine de ces événements. Ils affirment que c’est la raison pour laquelle un détachement des forces de défense et de sécurité a cueilli le leader de Pastef pour rétablir l’ordre. Depuis lors, le candidat déclaré à la présidentielle de 2024 n’est plus libre de ses mouvements. Les dénonciations des organisations de la société civile et d’autres membres de l’opposition n’y ont rien fait. Il reste maintenant à savoir quelle est la véritable intention du régime concernant le cas de Sonko. Une arrestation du chef de l’opposition n’est pas exclue. Le ministre de la justice a affirmé qu’ils attendaient le jugement pour exécuter la décision de justice. En tout cas, il est clair que la police et la gendarmerie ne vont pas perpétuellement barricader la demeure de celui que les sondages placent en pôle position pour remporter le scrutin de 2024 s’il est éligible. Alors que le principal concerné a jusque-là montré une résistance farouche qui a fait sans doute qu’il a pu passer entre les mailles du filet.
Le gouvernement n’a pas dit son dernier mot. Les multiples sorties des autorités montrent qu’ils sont déterminés à régler définitivement le problème de celui qu’ils dépeignent comme quelqu’un qui veut affaiblir les institutions de la République. Ses diatribes contre la justice sont utilisés comme arguments de même que sa décision de créer une association de maire parallèle à celle qui a jusque-là assumé ce role. Une initiative qui a davantage creusé le fossé entre Macky Sall et son plus farouche opposant pour qui tous les moyens sont bons pour montrer qu’il ne reconnaît pas l’autorité du président de la République. La suite logique a été son refus catégorique de participer au dialogue, prenant ses distances avec ses alliés qui ont un point de vue différent. Comme si pour le maire de Ziguinchor, Macky Sall est une maladie contagieuse que personne ne devrait jamais approcher.
Cette malveillance, Macky la rend bien à Sonko. Le chef de l’État lui, traite surtout son ennemi déclaré avec mépris, laissant le soin à ses seconds couteaux de mener la lutte frontale contre celui que des affidés du régime qualifient de rebelle. À la guerre comme à la guerre. Mame Mbaye Niang n’a pas ainsi hésité à porter plainte alors qu’il était accusé de detournement présumé par l’inspecteur principal des impôts et domaines. Profitant d’une faille dans communication du leader de Pastef qui aurait pu s’épargner ce procès, pour lui voler son éligibilité. Sauf que l’Etat semble ne pas se suffire de cette petite victoire. Des responsables du régime appellent aujourd’hui à l’arrestation d’Ousmane Sonko après sa condamnation pour corruption de jeunesse dans l’affaire sweet beauté. Alors que le chef de file des patriotes n’est pas agneau à se laisser mener vers l’autel du sacrifice sans résistance.
Tous les ingrédients sont donc réunis pour un combat à mort. Les dernières émeutes ont été d’une violence jamais égalée. La réponse a été la hauteur de l’affront. Le résultats est que le Sénégal déplore aujourd’hui plus de trente morts officiels depuis l’éclatement de l’affaire sweet beauté. Alors que les parties sont toujours déterminés à en decoudre. Comme si, il était impossible pour Macky Sall et Ousmane Sonko de cohabiter sur le même territoire. Si force reste à la loi, « Macky Sall devra se salir les mains » pour paraphraser Sonko. Ce dernier lui compte sur son bouclier populaire pour lutter contre la force publique. Ainsi, des morts, il y en aura encore. Combien? C’est cela la question.
Le Sénégal est donc à la croisée des chemins. C’est l’époque la plus trouble de son histoire depuis les indépendances. Notre pays a su jusqu’à présent faire preuve de résilience en surmontant la deuxième vague des émeutes. Seulement, il n y a jamais deux sans trois dit l’adage. Croisons les droits pour que cette règle ne se vérifie pas cette fois-ci mais son exception. En tout cas, les signaux sont au rouge puisque le discours des religieux qui ont jusque-là joué le rôle de régulateurs sociaux ne sont plus aussi écoutés.