Bakary Domingo Mané a tenu à rendre hommage au responsable de Pastef, morte selui lui dans des circonstances non encore élucidées. Pour le journaliste, il faut aller au-delà des évidences pour savoir si le meurtre de la dame de Keur Massar a été commandité ou non. L’ancien directeur de publication de sud quotidien et enseignant à l’ISSIC utilise dans cet éditorial publié dans seneplus des mots forts tels que « assassinée » et déclare que « ce crime ne restera pas impuni ».
Éditorial
Mariama Sagna, la responsable de Pastef de Keur Massar, assassinée quelques heures, après le meeting qu’elle a organisé en l’honneur de son leader, Ousmane Sonko, repose en paix, depuis jeudi 11 octobre, au cimetière de Kagnobon, son village natal, en Casamance. Nous avons tenu, à lui rendre hommage, en griffonnant ces quelques lignes, pour que ce crime ne reste pas impuni.
Iyo, Oukatoral, Mariama, Ujow kasumay ! ✱ Tu as quitté, parents, amis et camarades de parti, dans une tristesse qui n’a d’égale que la bêtise humaine qui a mis fin à tes jours. La violence gratuite, celle qui sème les graines de la mort, s’est exprimée dans un langage barbare, ne laissant aucune chance à un quelconque déploiement de la raison. Ils t’ont arraché à notre affection, alors que ton visage est loin d’être ridé par les sillons de la sagesse.
Mais tu es accueillie, là-haut, par les ancêtres de Kagnobon, de la Casamance toute entière, qui célèbrent ta venue…hélas, prématurée ! Une calebasse remplie de lait caillé, du vin de palme (bunuk) et un coq au plumage blanc, est le présent que tu as reçu de leurs mains. Signant désormais, ta rentrée dans le monde des âmes, tombeau de l’enveloppe corporelle.
Tu as ainsi, traversé le miroir et tu peux, à présent, nous dire la vraie motivation de tes bourreaux. Car tu es dans le monde de la vérité. Seulement, le lieu d’où tu t’exprimes et le langage que tu utilises, creusent davantage le fossé entre toi et ceux qui veulent voir éclore la vérité. Ils sont prisonniers d’un univers où la temporalité sous-tend toutes les actions humaines. Ce n’est pas le cas pour celui du Père, à la droite de qui tu es confortablement assise.
Cependant, il n’y a pas lieu de désespérer. Les ancêtres t’ont fait la promesse, lors de ton accueil, de faire toute la lumière sur le crime dont tu es victime. Et tes bourreaux n’auront d’autre choix que d’avouer leur forfait. Du fait de l’intervention des «dieux», ils diront, s’ils ont agi sous la pulsion du libre arbitre ou les ordres d’un homme au destin funeste. Le panier couvert d’un pagne blanc, tenu par des femmes «pures» et à la force surnaturelle, délivrera son verdict.
Ils ont parlé trop vite, ceux qui écartent toute autre piste, en dehors du crime crapuleux. Les choses semblent, en apparence, simples : des «charretiers», dit-on, défoncent une porte, «violent» la locataire, avant de «l’étrangler», puis «subtilisent» un «poste téléviseur» etc.
Justement, toute la difficulté de cette affaire, réside dans son extrême simplicité. La raison doit, alors, prendre le chemin de traverse de l’exil intérieur, lorsque les choses se présentent sous des apparences évidentes. Le proverbe chinois nous prévient : «L’endroit le plus sombre est sous la lampe.»
Parce que la lumière crève l’œil, l’empêchant de voir, que le doute doit être la béquille qui nous permet de traverser la voie minée par les subterfuges des hommes. Ils ont pactisé avec le diable et leur cœur est dur comme le roc, imperméable au ruissellement des eaux purificatrices des âmes égarées.
Iyo, Oukatoral, Mariama !
Signifie en langue diola : Bien, au revoir, Mariama, Pars en paix !
Bakary Domingo Mané